Sitôt que le kayakiste a passé ses jambes dans l’hiloire, rabattu sa jupe et franchi la barre d’écume, il fait corps avec son embarcation. Il ne relève pas totalement du monde marin, car il lui faudra encore se ravitailler, marquer des pauses et dresser le bivouac, mais il échappe aux réalités terrestres. Bercé par le clapot et la plongée régulière de sa pagaie, c’est à ses bras qu’il confie désormais sa motricité et, le regard fixé vers un cap, glisse sur la mer toujours recommencée. Battures, courants, houle et vagues le remplissent-ils d’effroi ? Les amers, les golfes, les îles et les promontoires le comblent de joie. Sa connivence avec le monde aquatique n’en serait-elle pas décuplée ? Il en fréquente désormais les habitants – alques, balbuzards, marsouins et phoques –, dont il s’approche lancé sur son erre. Et son regard ne gagne-t-il pas en acuité ? Un animalcule – méduse ou krill –, un herbier de posidonies ou une laminaire, capte son attention. Observateur attentif, voire parfois craintif du ciel, en osmose avec l’élément liquide, il devient aussi un remarquable connaisseur du littoral. Fouetté par le vent, ballotté par l’océan, il réapprend à aimer la terre.
Data pubblicazione
05/05/2018